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ROMÉO ET JULIETTE.
mer jamais, et ce serment — me tue en me laissant vivre, puisque c’est un vivant qui te parle.
BENVOLIO.

— Suis mon conseil ; cesse de penser à elle.

ROMÉO.

— Oh ! apprends-moi comment je puis cesser de penser.

BENVOLIO.

— En rendant la liberté à tes yeux : — examine d’autres beautés.

ROMÉO.

Ce serait le moyen — de rehausser encore ses grâces exquises. — Les bienheureux masques qui baisent le front des belles, — ne servent, par leur noirceur, qu’à nous rappeler la blancheur qu’ils cachent. — L’homme frappé de cécité ne saurait oublier — le précieux trésor qu’il a perdu avec la vue. — Montre-moi la plus charmante maîtresse : — que sera pour moi sa beauté, sinon une page — où je pourrai lire le nom d’une beauté plus charmante encore ? — Adieu : tu ne saurais m’apprendre à oublier.

BENVOLIO.

— J’achèterai ce secret-là, dussé-je mourir insolvable !

Ils sortent.

SCÈNE II.
[Devant la maison de Capulet.]
Entrent Capulet, Pâris et le Clown.
CAPULET.

— Montague est lié comme moi, — et sous une égale caution. Il n’est pas bien difficile, je pense, — à des vieillards comme nous de garder la paix (47).