Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1868, tome 7.djvu/207

Cette page a été validée par deux contributeurs.
203
SCÈNE XXXV.
gorge — le nom d’Antoine, suspendu — entre son cœur et ses lèvres : elle a rendu l’âme, gardant ton nom enseveli en elle.
ANTOINE.

Elle est donc morte ?

MARDIAN.

Morte !

ANTOINE.

— Éros, désarme-moi ; la tâche de la longue journée est finie, — et nous devons dormir.

À Mardian.

Pars d’ici sain et sauf, — et tiens-toi pour bien payé de ta peine. Va.

Mardian sort.

Allons, défais tout cela.

Éros lui enlève son armure, pièce à pièce.

— Le bouclier à sept peaux d’Ajax ne saurait contenir — les battements de mon cœur. Oh ! déchirez-vous, mes flancs ! — Mon cœur, sois plus fort que ton récipient — et brise ta frêle enveloppe… Vite, Eros, vite ! — Je ne suis plus un soldat… Lambeaux de mon armure, allez ! — Vous avez été noblement portés !… Laisse-moi un instant.

Éros sort.

— Je vais te rejoindre, Cléopâtre, et — implorer mon pardon. Oui, il le faut, car maintenant — tout délai est torture… Puisque la torche est éteinte, — couchons-nous, sans plus tarder. Maintenant tout labeur — s’évertuerait en pure perte ; la force ne ferait que s’embarrasser — par ses efforts même. Apposons notre sceau, et tout est fini… — Éros !… Je viens, ma reine… Éros ! Attends-moi. — Là où les âmes couchent sur des fleurs, nous irons, la main dans la main, — et nous éblouirons les esprits de notre auguste apparition ; — Didon et son