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OTHELLO.

RODERIGO.

— Je n’ai pas une grande ferveur pour l’action, — et cependant il m’a donné des raisons satisfaisantes. — Ce n’est qu’un homme de moins ! En avant, mon épée ! il est mort.

Il se met en place et tire son épée.
IAGO, à part.

— J’ai frotté ce jeune ulcère presque au vif, — et le voilà qui s’irrite. Maintenant, qu’il tue Cassio — ou que Cassio le tue ou qu’ils se tuent l’un l’autre, — tout est profit pour moi. Si Roderigo vit, — il me somme de lui restituer — tout l’or et tous les bijoux que je lui ai escamotés — comme cadeaux à Desdémona ; — c’est ce qui ne doit pas être. Si Cassio survit, — il a dans sa vie une beauté quotidienne — qui me rend laid… Et puis, le More — pourrait me dénoncer à lui ; je vois là pour moi un grand péril. — Non, il faut qu’il meure !… Mais voici que je l’entends venir.

Entre Cassio.
RODERIGO.

— Je reconnais son pas. C’est lui !… Misérable ! tu es mort !

Il s’élance de son poste et porte une botte à Cassio.

CASSIO, dégainant.

— Ce coup m’aurait été fatal, en effet, — si ma cotte n’eût été meilleure que tu ne le pensais ; — je veux éprouver la tienne.

Il frappe Roderigo.
RODERIGO, tombant.

Oh ! je suis tué !

Iago s’élance de son poste, atteint Cassio par-derrière à la jambe, et s’enfuit (53).