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CYMBELINE.

IMOGÈNE.

— J’ai donc lu trois heures : mes yeux sont fatigués. — Plie le feuillet où j’en suis restée, et va te coucher. — N’emporte pas le flambeau, laisse-le brûler. — Ah ! si tu peux te lever vers quatre heures, — éveille-moi, je te prie. Le sommeil m’a toute envahie.

Hélène sort.

— Dieux, je me confie à votre protection ! — Des fées et des tentateurs nocturnes — gardez-moi, je vous en supplie !

Elle s’endort.
Iachimo sort du coffre.
IACHIMO.

— Le grillon chante, et les sens harassés de l’homme — se réparent dans le repos. Ainsi mon compatriote Tarquin — foula doucement les tapis de jonc avant d’éveiller — la chaste beauté qu’il viola… Ô Cythérée ! — comme tu pares ton lit ! Frais lis, — plus blanc que tes draps ! que je puisse te toucher !… — Rien qu’un baiser, un seul !… Rubis incomparables, — comme vous le rendez cher ! C’est son haleine qui — parfume ainsi la chambre : la flamme du flambeau — se penche vers elle et voudrait regarder sous ses paupières — pour entrevoir la lumière maintenant couverte — par ces rideaux d’un blanc azuré que frange — un bleu céleste ! Mais ne perdons pas de vue mon projet. — Pour bien me souvenir de la chambre, je vais tout écrire.

Il tire un carnet et prend des notes.

Tels et tels tableaux. Là, la fenêtre… Le lit — orné de cette façon… Cette tapisserie — avec telle et telle figure… Le sujet qu’elle représente… — Ah ! quelques notes prises d’après nature sur son corps — en diraient dix mille fois