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SCÈNE VI.
que la corruption peut prêter à la nature ! à une engeance gangrenée, — capable d’empoisonner même le poison ! Ah ! vengez-vous ; — sinon celle qui vous porta n’était pas reine, et vous — êtes déchue de votre auguste souche !
IMOGÈNE.

Me venger ! — Comment puis-je me venger ? Si ce que vous dites est vrai, — car j’ai un cœur qui — ne peut pas en croire aussi vite mes oreilles ; si ce que vous dites est vrai, comment me vengerais-je ?

IACHIMO.

Devez-vous vous résigner à — vivre, comme une prêtresse de Diane, entre des draps glacés, — tandis qu’il se vautre sur d’autres, — aux mépris de vos droits, aux dépens de votre bourse ? — Vengez-vous ! — Je me consacre à votre bonheur ; — plus digne que ce renégat de votre lit, — je resterai à jamais votre amant fidèle, — discret et sûr.

Il se rapproche d’Imogène pour l’embrasser.
IMOGÈNE.

À moi, Pisanio !

IACHIMO.

— Laissez-moi sceller mon dévouement sur vos lèvres.

IMOGÈNE.

— Arrière !… Je me blâme de t’avoir — si longtemps écouté… Si tu avais de l’honneur, — tu m’aurais fait ce récit par respect pour la vertu, — et non dans le but vil et étrange que tu te proposes. — Tu diffames un gentilhomme qui est aussi loin — de ta calomnie que tu l’es de l’honneur ; et — tu poursuis ici une femme qui te méprise — à l’égal du démon… À moi, Pisanio ! — Le roi mon père sera informé — de ton attentat : s’il trouve bon — qu’un étranger impudent vienne marchander à sa cour — comme dans un bouge de Rome, et nous ex-