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SCÈNE III.

NESTOR.

Quelle est-elle ?

ULYSSE.

La voici. — Les coins obtus fendent les nœuds les plus durs. L’orgueil en épi, — qui atteint sa maturité — dans le cœur luxuriant d’Achille, doit être fauché dès à présent ; — sinon, il va s’égrener et semer partout des maux — qui nous étoufferont tous.

NESTOR.

Sans doute, mais comment ?

ULYSSE.

— Ce défi que le vaillant Hector nous envoie, — bien qu’adressé à tous en général, — n’est effectivement destiné qu’à Achille.

NESTOR.

L’intention est aussi claire qu’un compte — dont le total est résumé en quelques chiffres. — Il suffira, croyez-le bien, de la publication de ce défi, — pour qu’Achille, eût-il le cerveau aussi aride — que les sables de la Lybie (et ils sont assez stériles. — Apollon le sait) reconnaisse à la première réflexion, — oui, en un clin d’œil, qu’il est l’adversaire — désigné par Hector.

ULYSSE.

— Et pensez-vous que cette publication le décide à répondre ?

NESTOR.

Oui, — il le faut bien. Quel autre qu’Achille pourriez-vous opposer — à Hector, pour lui enlever l’honneur de la victoire ! Bien qu’il s’agisse d’une joute courtoise, — c’est une épreuve qui importe beaucoup à l’opinion ; — car ici les Troyens veulent déguster notre plus chère renommée — avec leur palais le plus délicat. Et croyez-moi, Ulysse, — notre réputation va être étrangement pesée — dans cette nation fantasque. Le succès, — bien