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SCÈNE II.
admirable jeunesse ! il n’a pas encore vu ses vingt-trois ans. Va ton chemin, Troylus, va ton chemin ! Si j’avais pour sœur une Grâce ou pour fille une déesse, je te laisserais bien choisir. Ô admirable homme !… Pâris ? Pâris est de la fange auprès de lui ! Je vous garantis qu’Hélène changerait bien et qu’elle donnerait de l’argent par-dessus le marché !
Des Troupes traversent la scène.
CRESSIDA.

En voici d’autres qui viennent.

PANDARUS.

Ânes, fous et butors ! paille et son, son et paille ! potage après la viande !… Je pourrais vivre et mourir sans perdre de vue Troylus. Ne regardez plus, ne regardez plus. Les aigles sont passés ! Corbeaux et buses ! buses et corbeaux ! J’aimerais mieux être Troylus qu’Agamemnon et toute la Grèce.

CRESSIDA.

Il y a parmi les Grecs, Achille qui certes vaut mieux que Troylus.

PANDARUS.

Achille ? un charretier, un portefaix, un vrai chameau.

CRESSIDA.

Allons ! allons !

PANDARUS.

Allons ? allons ?… Avez-vous du discernement ? avez-vous des yeux ? savez-vous ce que c’est qu’un homme ? La naissance, la beauté, la bonne mine, l’éloquence, la bravoure, la science, la douceur, la vertu, la jeunesse, la libéralité et autres qualités semblables, ne sont-elles pas les épices et le sel qui assaisonnent un homme ?

CRESSIDA.

Oui, un homme d’une pâte particulière qu’on n’a pas