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PANDOSTO OU LE TRIOMPHE DU TEMPS.

Bohême… Pandosto ne les eut pas plutôt vus que, avec une contenance joyeuse, il leur demanda : Quelles nouvelles ? Les envoyés dirent à sa majesté qu’ils avaient reçu du dieu une réponse écrite dans un rouleau, mais qu’ils avaient eu ordre de ne la lire qu’en présence du roi, et sur ce ils lui remirent le parchemin. Mais les nobles, se fondant sur ce que cet écrit contenait le salut et l’honneur de la reine, ou sa mort et son infamie perpétuelle, supplièrent le roi de rassembler ses nobles et ses communes dans la salle du tribunal, où la reine, amenée comme prisonnière, entendrait le jugement de l’oracle. Charmé de cet avis, Pandosto fixa le jour, assembla ses lords et ses communes, et fit amener la reine devant le tribunal… Alors il ordonna à un de ses ducs de lire le contenu du parchemin. À peine les communes l’eurent-elles entendu, qu’elles jetèrent un grand cri et battirent des mains en réjouissance de ce que l’innocence de la reine était reconnue. Quant au roi, il fut si honteux de sa téméraire folie, qu’il supplia ses nobles d’engager Bellaria à lui pardonner et à oublier ses torts ; promettant de se montrer à son égard un mari loyal et aimant, et en outre de se réconcilier avec Egistus et Franion ; enfin, révélant devant tous la cause véritable de leur évasion secrète, et comment il aurait traîtreusement fait mettre Egistus à mort, si l’honnêteté de son échanson n’avait empêché son projet. Comme il exposait ainsi toute l’affaire, on vint lui annoncer que son fils Garinter était mort soudainement. À cette nouvelle, Bellaria fut prise d’un désespoir aussi grand que sa joie venait d’être vive, et ses forces vitales l’abandonnèrent au point qu’elle tomba morte sur-le-champ et ne put jamais être rappelée à la vie.

Ce brusque spectacle épouvanta à ce point le roi qu’il tomba de son trône évanoui. Ses nobles l’emportèrent