Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1868, tome 4.djvu/484

Cette page a été validée par deux contributeurs.
480
TROYLUS ET CRESSIDA, BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN, ETC.

(15) Galathe est, en effet, le nom que l’histoire de la Destruction de Troie attribue au cheval favori d’Hector.

(16) Dryden a changé complètement le dénoûment de Shakespeare, à qui il reproche, dans sa préface, de ne pas avoir puni Cressida de sa fausseté. Afin de réparer l’erreur qu’il dénonçait, le poëte de la Restauration a fait mourir Cressida ; mais comme, dans la pièce refaite, Cressida est fidèle à Troïlus, et ne s’est pas réellement donnée à Diomède, il s’en suit qu’elle n’est pas coupable, et que le poëte s’est retiré le droit de la punir. Étrange aberration ! Dryden blâme Shakespeare d’avoir pardonné à une coupable, et lui, Dryden, il châtie une innocente ! Il faut voir cela pour y croire ; je traduis donc ici cette dernière scène qui se passe sur le champ de bataille :

Entre Diomède, faisant retraite devant Troïlus, et tombant au moment où il entre.
TROÏLUS.

— Implore la vie ou meurs !

DIOMÈDE.

Non ! profite de ta fortune ! — Je dédaigne une vie que tu peux donner ou prendre.

TROÏLUS.

— Ferais-tu fi de ma pitié, misérable ?… Eh bien, que ton désir soit exaucé !

Il lève le bras. Cressida s’élance vers lui et le retient.
CRESSIDA.

Retenez, retenez votre main, monseigneur, et écoutez-moi.

Troïlus se retourne. Aussitôt Diomède se relève. Les Troyens et les Grecs entrent et se rangent des deux côtés derrière leurs capitaines.
TROÏLUS.

— N’ai-je pas entendu la voix de la parjure Cressida ? Viens-tu ici pour donner le dernier coup à mon cœur ? Comme si les preuves de ta perfidie première n’étaient pas assez convaincantes, viens-tu ici — pour implorer la vie de mon rival ? — Oh ! s’il restait en toi une étincelle de loyauté, — tu ne pourrais pas ainsi lui témoigner sous mes yeux même ta préférence.

CRESSIDA.

— Que dirai-je ! la pensée que vous me croyiez infidèle — m’a rendue muette. Ah ! laisse-le vivre, mon Troïlus ; — par toutes nos amours, par toutes nos tendresses passées, — je t’adjure de l’épargner.

TROÏLUS.

Enfer et mort !