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LE CONTE D’HIVER.
appartient — la moitié d’un trône, moi, fille d’un grand roi, — mère d’un prince, espoir de tous, être ici debout — à argumenter et à pérorer pour ma vie et mon honneur devant — le premier venu qui daigne m’entendre ! La vie, je l’évalue — ce que pèse une douleur dont je voudrais être délivrée ! Mais l’honneur, — il est réversible de moi aux miens, — et c’est pour lui seul que je suis ici debout ! J’en appelle — à votre propre conscience, sire. Avant l’arrivée de Polixène — à votre cour, n’étais-je pas dans vos grâces, — et ne méritais-je pas d’y être ? Et, après son arrivée, — à quelle intrigue illicite — me suis-je prêtée, pour comparaître ici ? Pour peu que j’aie transgressé — les bornes de l’honneur, ou que, par action ou par pensée, — j’aie incliné à les franchir, que les cœurs — de tous ceux qui m’écoutent s’endurcissent, et que mon plus proche parent — crie : Infamie ! sur ma tombe !
LÉONTE.

Je n’ai jamais ouï dire — que le vice effronté eût — moins d’impudence pour nier ses actes — que pour les commettre.

HERMIONE.

C’est une remarque vraie, — sire, mais qui ne m’est pas due.

LÉONTE.

— Vous ne voulez pas l’avouer.

HERMIONE.

Je ne puis reconnaître, — dans les fautes qui me sont reprochées, que celles — dont je suis responsable. Pour Polixène, — dont on fait mon complice, je confesse — que je l’ai aimé, aussi honorablement qu’il désirait l’être, — de cette espèce d’amour qui convenait — à une dame de mon rang, avec l’amour, — et rien qu’avec l’amour que vous-même m’aviez commandé pour lui. —