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LE CONTE D’HIVER.
sion sera la mort non-seulement — pour toi, mais pour ta femme insolente — à qui nous pardonnons pour cette fois. Nous t’enjoignons, — comme à notre homme lige, d’enlever — cette bâtarde, de la transporter — sur quelque plage lointaine, hors — de nos domaines, et de l’abandonner là, — sans plus de pitié, à sa propre protection — et à la merci du climat. Comme elle nous est venue — par un étrange hasard, je te somme, en toute justice, — sous peine de péril pour ton âme et de tortures pour ton corps, — de l’abandonner à quelque lieu étrange — où la fortune pourra l’élever ou la détruire ! Emporte-la !
ANTIGONE.

— Je jure de le faire, bien qu’une mort immédiate — eût été plus clémente. Viens, pauvre enfant ! — Que quelque esprit puissant te donne les milans et les corbeaux — pour nourrices ! On dit que les loups et les ours, — se dépouillant de leur sauvagerie, ont rempli parfois — cet office de pitié. Seigneur, soyez prospère — plus que cette action ne le mérite ! Et toi, que la bénédiction du ciel — te protège contre tant de cruauté, — pauvre être, condamné à périr !

Il sort, emportant l’enfant.
LÉONTE.

Non, je n’élèverai pas — l’enfant d’un autre.

PREMIER HUISSIER.

Pardonnez, altesse, des courriers — ont apporté des nouvelles de vos envoyés auprès de l’oracle, — il y a déjà une heure. Cléomène et Dion, — heureusement arrivés de Delphes, ont tous deux débarqué — et viennent en hâte à la cour.

PREMIER SEIGNEUR.

Ne vous déplaise, sire, leur promptitude — a dépassé toute attente.