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LE CONTE D’HIVER.
des milliers d’êtres qui n’en ont prospéré que mieux, — mais ils n’ont jamais tué personne. Camillo, — si vous êtes, comme j’en suis sûr, un gentilhomme, — si de plus vous avez ce savoir, cette expérience qui n’ornent pas moins — notre noblesse que le nom titré des aïeux — dont la gloire nous fait nobles, je vous en supplie, — pour peu que vous sachiez une chose qu’il m’importe — d’apprendre, ne l’emprisonnez pas — dans une discrète ignorance !
CAMILLO.

Je ne puis répondre.

POLIXÈNE.

— Une maladie gagnée de moi, quoique je me porte bien ! — Il me faut une réponse… Écoute, Camillo : — je t’en conjure par toutes les suggestions humaines — que l’honneur reconnaît, et la moindre — n’est pas la prière que je t’adresse, déclare-moi — quel est l’incident de malheur que tu sens — ramper vers moi ; s’il est loin, s’il est près ; — quel moyen il y a de le prévenir, s’il en est un ; — sinon, comment y faire face !

CAMILLO.

Seigneur, je vais vous le dire, — puisque j’en suis sommé sur l’honneur et par quelqu’un — que je tiens pour honorable. Donc, attention à mon conseil ! — Qu’il soit suivi aussi vite — que je compte l’exprimer ; sinon, vous et moi, — n’aurons plus qu’à crier : Tout est perdu ! et puis bonsoir !

POLIXÈNE.

Parle, bon Camillo.

CAMILLO.

— Je suis l’homme désigné pour vous tuer.

POLIXÈNE.

— Par qui, Camillo ?