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SCÈNE XIII.

CLAUDIO.

Nous avons failli avoir nos deux nez rompus par deux vieux hommes édentés.

DON PEDRO.

Léonato et son frère ! Qu’en dis-tu, Bénédict ? Si nous nous étions battus, je doute que nous eussions été trop jeunes pour eux.

BÉNÉDICT.

Il n’y a pas de vraie valeur dans une querelle injuste. Je vous cherchais tous deux.

CLAUDIO.

Et nous, nous t’avons cherché partout : nous sommes en proie à une mélancolie opiniâtre, et nous voudrions la chasser. Veux-tu y employer ton esprit ?

BÉNÉDICT.

Il est dans mon fourreau : dois-je l’en tirer ?

DON PEDRO.

Est-ce que tu portes ton esprit au côté ?

CLAUDIO.

C’est ce qui ne s’est jamais fait, quoique bien des gens aient l’esprit de travers. N’importe ! je veux voir la pointe du tien, et je ne te demande, comme à un ménestrel, qu’une pointe amusante.

DON PEDRO.

Foi d’honnête homme, il pâlit.

À Bénédict.

Es-tu malade ou furieux ?

CLAUDIO.

Allons ! du courage, l’ami ! Le chagrin a beau tuer un chat, tu as assez de fermeté pour tuer le chagrin.

BÉNÉDICT.

Monsieur, je riposterai à votre esprit sur le terrain, si vous pressez ainsi l’attaque… Choisissez, je vous prie, un autre sujet.