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BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN.

BÉATRICE.

Que veut dire cette folle ?

MARGUERITE.

Moi ? rien ! je souhaite seulement que Dieu envoie à chacun ce qu’il désire.

HÉRO.

Voici des gants que le comte m’a envoyés ; ils ont un parfum exquis.

BÉATRICE.

Je suis enchiffrenée, cousine ; je ne puis rien sentir.

MARGUERITE.

Être fille et ne plus rien sentir ! Il a fallu pour cela un rhume extraordinaire.

BÉATRICE.

Oh ! Dieu me pardonne ! Dieu me pardonne ! Depuis quand avez-vous pris tant de verve ?

MARGUERITE.

Depuis que vous n’en avez plus. Est-ce que mon esprit ne me sied pas à ravir ?

BÉATRICE.

On ne le voit pas assez : vous devriez le mettre à votre chapeau… Sur ma parole, je suis mal disposée.

MARGUERITE.

Procurez-vous de l’essence de Carduus Benedictus (24), et appliquez-en sur votre cœur : c’est le seul remède contre les nausées.

HÉRO, à Marguerite.

Tu viens de la piquer avec un chardon.

BÉATRICE.

Benedictus ? pourquoi Benedictus ? Vous cachez quelque apologue sous ce Benedictus.

MARGUERITE.

Un apologue ! Non, ma foi, je n’ai aucune intention cachée ; je parle du simple chardon béni. Vous