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BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN.
Si je lui en parlais, — elle me bernerait ; oh ! elle me désarçonnerait — d’un éclat de rire, elle m’écraserait d’esprit. — Aussi, que Bénédict, comme un feu qu’on recouvre, — se consume en soupirs et s’épuise intérieurement ! — Cette fin-là vaut mieux que de mourir bafoué, — chose aussi cruelle que de mourir chatouillé.
URSULE.

— Pourtant parlez-lui-en ; écoutez ce qu’elle dira.

HÉRO.

— Non ; j’aime mieux aller trouver Bénédict, — et lui conseiller de combattre sa passion ; — j’inventerai même quelque honnête calomnie — pour en ternir ma cousine : on ne sait pas — combien une méchante parole peut empoisonner l’amour.

URSULE.

Oh ! ne faites pas à votre cousine un pareil tort. Elle ne doit pas manquer de jugement, — (pour peu qu’elle ait l’esprit vif et supérieur — qu’on lui reconnaît), au point de refuser — un gentilhomme aussi accompli que le signor Bénédict.

HERO.

— Il est le premier homme d’Italie, — toujours excepté mon cher Claudio.

URSULE.

— De grâce, ne vous fâchez pas contre moi, Madame, — si je vous dis ma pensée : le signor Bénédict, pour la tournure, pour les manières, pour l’esprit, pour la valeur, — est placé le plus haut dans l’opinion de l’Italie.

HÉRO.

— Il a, il est vrai, une réputation parfaite.

URSULE.

— Il l’a méritée par ses perfections, avant de l’obtenir. — À quand votre mariage, madame ?