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RICHARD III.
par le cours furtif des heures, — sera digne du siége de majesté, — et nous rendra tous sans doute heureux par son règne. — C’est à lui que je défère ce que vous voudriez me déférer, — le legs fortuné de son heureuse étoile ! — Dieu me préserve de le lui extorquer !
BUCKINGHAM.

— Milord, voici qui révèle la conscience de votre grâce : — mais, toutes les circonstances bien considérées, — ces scrupules sont subtils et frivoles. — Vous dites que cet enfant est le fils de votre frère Édouard : — oui, mais pas par sa femme légitime. — Car Édouard s’était engagé déjà avec lady Lucy : — votre mère vit encore pour attester sa promesse ; — plus tard il fut fiancé par procuration — à Bonne, sœur du roi de France. — Ces deux femmes mises à l’écart, est venue une pauvre solliciteuse, — une mère accablée d’enfants, — beauté sur le retour, veuve éplorée, — qui, dans le plein après-midi de ses charmes, — a conquis et fixé les regards libertins d’Édouard, — et qui l’a entraîné, du sommet élevé de toutes ses idées, — sur la pente vile de l’immonde bigamie. — C’est d’elle, dans ce lit illégitime, qu’il a eu — cet Édouard que par courtoisie nous appelons le prince. — Je pourrais discuter la chose plus amèrement, — si, par égard pour certaine vivante, — je ne retenais ma langue dans de discrètes limites. — Ainsi, mon bon lord, prenez pour votre royale personne — la dignité qui vous est offerte, — sinon pour nous rendre heureux, et avec nous le pays, — du moins pour ramener votre noble liguée, — de la corruption causée par les abus, — à la succession légitime et vraie.

LE MAIRE.

— Acceptez, mon bon lord : vos bourgeois vous en conjurent.