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RICHARD III.
vertueux ! — Il est mon fils, oui ! et aussi ma honte ! — Mais ce n’est pas à mes mamelles qu’il a sucé cette perfidie !
LE FILS.

— Est-ce que vous croyez, grand’mère, que mon oncle ne disait pas la vérité ?

LA DUCHESSE.

— Oui, mon enfant.

LE FILS.

— Je ne peux pas le croire… Écoutez ! Quel est ce bruit-là ?…


Entre la Reine Élisabeth d’un air égaré. Rivers et Dorset la suivent.


ÉLISABETH.

— Ah ! qui pourrait m’empêcher de pleurer et de gémir, — d’accuser mon sort et de me tourmenter ? — Je veux m’allier au noir désespoir contre mon âme — et devenir l’ennemie de moi-même !

LA DUCHESSE.

— Pourquoi cette scène de brusque désolation ?

ÉLISABETH.

— Pour achever un acte de tragique violence. — Édouard, mon seigneur, ton fils, notre roi, est mort. — Pourquoi reste-t-il des branches quand la racine a disparu ? — Pourquoi les feuilles qui n’ont plus leur sève ne se dessèchent-elles pas ? — Si c’est vivre que vous voulez, lamentez-vous ; si c’est mourir, hâtez-vous : — que nos âmes puissent rattraper celle du roi de leurs ailes rapides ; — que nous puissions, sujets obéissants, l’escorter — dans son nouveau royaume d’immuable repos !

LA DUCHESSE.

— Ah ! j’ai autant de part dans ta douleur — que j’avais de droits sur ton noble Édouard. — Jusqu’ici, pleu-