Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/308

Cette page a été validée par deux contributeurs.
304
RICHARD III.
respirer tranquille un moment, — que vous n’alliez la troubler de vos plaintes impudentes.
ÉLISABETH.

— Frère de Glocester, vous vous méprenez sur les faits. — C’est de son propre mouvement, — sans être provoqué par aucune sollicitation, — que le roi, préoccupé sans doute de cette haine intime — que vous témoignez, dans votre conduite extérieure, — contre mes enfants, contre mes frères et contre moi-même, — s’est décidé à vous mander, afin de pénétrer — le fond de votre mauvais vouloir et de le dissiper.

RICHARD.

— Je ne puis rien dire. Le monde est si dégénéré, — que des roitelets viennent piller là où l’aigle n’oserait percher ! — Depuis que tous les Jeannots sont devenus gentilshommes, — bien des gentilshommes sont devenus des Jeannots.

ÉLISABETH.

— Allons ! allons ! nous savons ce que vous voulez dire, frère Glocester. — Vous enviez mon élévation et celle de mes parents. — Dieu veuille que nous n’ayons jamais besoin de vous !

RICHARD.

— En attendant, Dieu veut que nous ayons besoin de vous. — C’est par vos manœuvres que mon frère est emprisonné, — moi disgracié, et toute la noblesse — tenue en mépris, tandis qu’on fait chaque jour — de grandes promotions pour anoblir ceux — qui, il y a deux jours, valaient à peine un noble !

ÉLISABETH.

— Par Celui qui du tranquille bonheur dont je jouissais — m’a élevée à ces grandeurs soucieuses, je jure — que je n’ai jamais excité sa majesté — contre le duc de Clarence, et que j’ai au contraire — plaidé sa cause en