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pensées perverses de leurs cœurs possédés, ainsi que quelqu’un l’a fort bien dit :

Pronus in iram
Stultorum est animus, facile excandescit et audet
Omne scelus, quoties concepta bile tumescit.

» Hubert du Bourg pensa donc que le roi, après plus mûre réflexion, se repentirait d’avoir donné un pareil ordre, et lui saurait peu de gré de l’avoir mis à exécution. Toutefois, pour le satisfaire momentanément et pour contenir la rage des Bretons, il fit dire par le pays, d’un côté, que l’ordre du roi avait été exécuté, et, de l’autre, qu’Arthur était mort de chagrin et de douleur. Durant l’espace de quinze jours, cette rumeur courut incessamment par les royaumes d’Angleterre et de France, et les cloches retentirent par toutes les villes et tous les villages comme pour ses funérailles. La rumeur ajoutait que son corps était enseveli dans le monastère de Saint-André de l’ordre de Cîteaux.

» Mais les Bretons, loin d’être pacifiés par cette nouvelle, n’en furent que plus ardents à venger la mort de leur souverain par toutes les violences qu’ils pouvaient imaginer. Alors il n’y eut pas d’autre remède que de déclarer publiquement qu’Arthur était toujours vivant et en bonne santé. Aussi, quand le roi apprit la vérité sur toute cette affaire, il ne fut nullement mécontent de ce que son ordre n’avait pas été exécuté, plusieurs de ses capitaines lui ayant signifié nettement qu’il ne trouverait pas de chevaliers pour garder ses châteaux, s’il traitait si cruellement son neveu. Car, s’il arrivait à l’un de ceux-ci d’être pris par le roi de France ou par quelqu’un de ses alliés, il serait sûr de goûter à la même coupe.

» Maintenant, quant à la manière dont eut lieu véri-