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le décider, cet argument désespéré, l’invective. « Elle l’appela faible couard, et lui reprocha de ne pas être désireux d’honneur, parce qu’il n’osait pas affronter avec virilité et courage la chose qui lui était offerte par la bienveillance de la fortune, bien que beaucoup d’autres avant lui eussent couru de plus grands risques pour des succès qu’ils ne désiraient pas autant[1]. »

Enfin, le thane consentit à faire le coup. « Il communiqua ses intentions à ses amis fidèles, dont le principal était Banquo, et, sur la promesse de leur assistance, il tua le roi Duncan à Inverness, d’autres disent à Botgosvane ; puis, ayant rassemblé autour de lui les complices de son entreprise, il se fit proclamer roi et se rendit immédiatement à Scone où, du consentement de tous, il reçut l’investiture de la royauté selon les formes d’usage[2]. »

Ainsi Macbeth a acheté par un crime le droit de s’asseoir sur ce fauteuil de Scone qui n’est plus aujourd’hui qu’une ruine. Ô néant de la grandeur royale ! C’est pour s’asseoir un instant là que le héros s’est fait assassin ! Mais il ne suffit pas d’avoir occupé le trône, il faut le garder.

Macbeth est condamné à la tyrannie par l’usurpation. Afin de prévenir la révolte, il épouvante la noblesse, il désarme le peuple, il caresse le clergé. Il multiplie les lois répressives : défense, sous peine de mort, de se rendre avec un compagnon à l’église, au marché, ou dans un lieu public. Défense d’entretenir un cheval, si ce n’est pour l’agriculture. Défense aux seigneurs de s’allier par mariage, si leurs terres sont voisines. Défense aux cours seigneuriales de siéger, etc. Mais, en revanche, comme il est pieux, le despote ! comme il est assidu aux églises, que de messes il fonde, et avec quelle onction il s’agenouille devant les châsses !

  1. Chronique de Boèce.
  2. Holinshed.