Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1865, tome 2.djvu/224

Cette page a été validée par deux contributeurs.

SÉBASTIEN, à Antonio.

Vilain temps !

ANTONIO.

Très-Vilain.

GONZALO, à Alonso.

— Si j’avais la colonisation de cette île, mon seigneur…

ANTONIO, à Sébastien.

— Il y sèmerait des orties.

SÉBASTIEN.

Des bardanes ou des mauves.

GONZALO, à Alonso.

— Et, si j’en étais le roi, savez-vous ce que je ferais ?

SÉBASTIEN, à Antonio.

— Il esquiverait l’ivresse, faute de vin.

GONZALO, à Alonso.

— Dans ma république, je ferais au rebours — toute chose : aucune espèce de trafic — ne serait permise par moi. Nul nom de magistrat, — nulle connaissance des lettres, ni richesse, ni pauvreté, — nul usage de service ; nul contrat, nulle succession ; — pas de bornes, pas d’enclos, pas de champ labouré, pas de vignobles. — Nul usage de métal, de blé, de vin, ni d’huile. — Nulle occupation : tous les hommes désœuvrés, tous ! — Et les femmes aussi ! mais elles, innocentes et pures ! — Point de souveraineté (21)…

SÉBASTIEN, à Antonio.

Et cependant il en serait le roi. —

ANTONIO.

La conclusion de sa république en oublie le préambule.

GONZALO.

— Tout en commun ! la nature produirait — sans sueur ni effort. Je n’aurais ni trahison, ni félonie, — ni