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à ce bon vieux temps où la pensée humaine, n’ayant pas encore le doute pour guide, errait dans le cul-de-sac des systèmes et des dogmes, s’arrêtant, en chaque science, à quelque texte : en astronomie, à Ptolémée, en physique, à Pline, en médecine, à Galien et à Hippocrate, en philosophie, à la double tradition de la légende et des livres saints.


Les générations du seizième siècle croyaient, avec la Bible, qu’un Dieu unique a créé l’homme, mais elles croyaient, avec la Bible aussi, qu’entre l’homme et le Dieu créateur, il existe une quantité innombrable de créatures invisibles.

Ces êtres immortels, n’ayant jamais failli et voués à une béatitude immuable, sont rangés sur les degrés d’une échelle immense que Jacob a entrevue et qui monte de la terre au ciel. Au bas de cette échelle, placés le plus près de l’homme, mais déjà inaccessibles à ses regards, voici les anges ; plus haut, voici les archanges ; plus haut, voici les principautés. Montons encore ! Plus haut, voici les puissances ; plus haut, voici les vertus ; plus haut, voici les dominations. Montons encore ! Plus haut, voici les trônes ; plus haut, voici les chérubins ; plus haut, voici les séraphins. Et enfin, voilà Dieu !

Lorsque Dieu, perdu dans l’infini, daigne envoyer quelque message à l’homme, il le lui fait transmettre ordinairement par un des êtres inférieurs de cette hiérarchie. C’est un ange qui arrête le bras d’Abraham prêt à immoler son fils ; c’est un ange qui console Agar dans le désert ; c’est un ange qui délivre saint Pierre enfermé dans les prisons d’Hérode. Quand il s’agit d’une mission plus importante, Dieu choisit, pour la remplir, un esprit de la série immédiatement supérieure. C’est l’archange Gabriel qui annonce à Marie qu’elle enfantera le Messie ;