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SCÈNE III.
[Une chambre dans la maison de Corambis.]
Entrent Léartes et Ofélia.
LÉARTES.

Mes bagages sont embarqués ; il faut que j’aille à bord. — Mais, avant que je parte, réfléchis bien à ce que je te dis. — Je vois que le prince Hamlet te fait des démonstrations d’amour. — Prends garde, Ofélia ; ne te fie pas à ses serments, — peut-être aujourd’hui t’aime-t-il, et sa langue — parle-t-elle du cœur ; mais pourtant fais attention, ma sœur. — La vierge la plus chiche est assez prodigue, — si elle démasque sa beauté pour la lune ; — la vertu même n’échappe pas aux calomnieuses pensées. — Crois-moi, Ofélia, tiens-toi hors de portée, — de peur qu’il ne jette à bas ton honneur et ta réputation.

OFÉLIA.

Frère, je vous ai prêté une oreille attentive, — et je suis bien résolue à garder ferme mon honneur. — Mais, mon cher frère, ne faites pas — comme ce sophiste retors — qui enseigne le sentier et le plus court chemin du ciel, — tandis que lui-même, insouciant libertin, — satisfait pleinement les appétits de son cœur, — sans se soucier beaucoup que son honneur périsse.

LÉARTES.

Non, n’aie pas peur de cela, ma chère Ofélia. — Voici mon père. L’occasion sourit à de seconds adieux.

Entre Corambis.
CORAMBIS.

Encore ici, Léartes ? À bord ! à bord ! Quelle honte !