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ma fille de vivre ; cela est impossible. Mais je vous prie tous deux de proclamer ici, devant tout le peuple de Messine, qu’elle est morte innocente ; et si votre amour peut trouver quelques vers touchants, suspendez-les en épitaphe, sur sa tombe et chantez-les sur ses restes. Chantez-les ce soir. – Demain matin, rendez-vous à ma maison, et puisque vous ne pouvez pas être mon gendre, devenez du moins mon neveu. Mon frère a une fille qui est presque trait pour trait le portrait de ma fille qui est morte, et elle est l’unique héritière de nous deux ; donnez-lui le titre que vous auriez donné à sa cousine ; là expire ma vengeance.

CLAUDIO. — Ô noble seigneur, votre excès de bonté m’arrache des larmes. J’embrasse votre offre, et désormais disposez du pauvre Claudio.

LÉONATO. — Ainsi, demain matin je vous attendrai chez moi ; je prends ce soir congé de vous. – Ce misérable sera confronté avec Marguerite qui, je le crois, est complice de cette mauvaise action, et gagnée par votre frère.

BORACHIO. — Non, sur mon âme, elle n’y eut aucune part ; et elle ne savait pas ce qu’elle faisait, lorsqu’elle me parlait : au contraire, elle a toujours été juste et vertueuse dans tout ce que j’ai connu d’elle.

DOGBERRY. — En outre, seigneur (ce qui, en vérité, n’a pas été mis en blanc et en noir), ce plaignant que voilà, le criminel, m’a appelé âne. Je vous en conjure, souvenez-vous-en dans sa punition ; et encore la garde les a entendus parler d’un certain La Mode : ils disent qu’il porte une clef à son oreille, avec une boucle de cheveux qui y est suspendue, et qu’il emprunte de l’argent au nom de Dieu ; ce qu’il a fait si souvent et depuis si longtemps, sans jamais le rendre, qu’aujourd’hui les hommes ont le cœur endurci, et ne veulent rien prêter pour l’amour de Dieu : je vous en prie, examinez-le sur ce chef.

LÉONATO. — Je te remercie de tes peines et de tes bons offices.

DOGBERRY. — Votre Seigneurie parle comme un jeune