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ne vous parût trop soudain, je voulais m’aider d’un plus long récit.

DON PÈDRE. — Et pourquoi faut-il que le pont soit plus large que la rivière ? La meilleure raison pour accorder, c’est la nécessité. Tout ce qui peut te servir ici est convenable. En deux mots, tu aimes, et je te fournirai le remède à cela. – Je sais qu’on nous apprête une fête pour ce soir ; je jouerai ton rôle sous quelque déguisement, et je dirai à la belle Héro que je suis Claudio ; j’épancherai mon cœur dans son sein, je captiverai son oreille par l’énergie et l’ardeur de mon récit amoureux ; ensuite j’en ferai aussitôt l’ouverture à son père ; et pour conclusion, elle sera à toi. Allons de ce pas mettre ce plan en exécution.

(Ils sortent.)


Scène II

Appartement dans la maison de Léonato. Léonato et Antonio paraissent.


LÉONATO. — Eh bien ! mon frère, où est mon neveu votre fils ? A-t-il pourvu à la musique ?

ANTONIO. — Il en est très-occupé. – Mais, mon frère, j’ai à vous apprendre d’étranges nouvelles auxquelles vous n’avez sûrement pas rêvé encore.

LÉONATO. — Sont-elles bonnes ?

ANTONIO. — Ce sera suivant l’événement ; mais elles ont bonne apparence et s’annoncent bien. Le prince et le comte Claudio se promenant tout à l’heure ici dans une allée sombre de mon verger, ont été secrètement entendus par un de mes gens. Le prince découvrait à Claudio qu’il aimait ma nièce votre fille ; il se proposait de le lui confesser cette nuit pendant le bal, et s’il la trouvait consentante, il projetait de saisir l’occasion aux cheveux et de s’en ouvrir à vous, sans tarder.

LÉONATO. — L’homme qui vous a dit ceci a-t-il un peu d’intelligence ?

ANTONIO. — C’est un garçon adroit et fin. Je vais l’envoyer chercher. Vous l’interrogerez vous-même.