Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 2.djvu/319

Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTICE SUR LA COMÉDIE DES MÉPRISES

Il est peu de comédies qui aient été aussi souvent et aussi diversement reproduites sur la scène que les Ménechmes de Plaute ; c’est la seule dette que Shakspeare ait contractée envers les auteurs dramatiques de l’antiquité. Mais il a su enrichir l’idée du poëte latin par l’apparence nouvelle qu’il lui donne et les incidents qu’il a multipliés. Les Méprises sont un vrai modèle d’intrigue. Tout le comique des situations résulte, il est vrai, d’une invraisemblance exagérée encore par Shakspeare ; car les deux frères jumeaux ont deux esclaves jumeaux comme eux, et qui portent le même nom. Mais, ainsi que l’observe très-bien M. Schlegel, il n’y a pas de degrés dans l’incroyable ; si l’on accorde une des ressemblances, on aura tort de faire des difficultés pour l’autre ; et si les spectateurs s’amusent des méprises, elles ne pourront jamais se croiser et se combiner trop diversement. La variété des événements et des rencontres imprévues des quatre frères ; le danger que court celui qui se voit arrêté pour dettes, et qui est ensuite enfermé comme fou, tandis que l’autre, voyant sa vie attaquée, est obligé de se réfugier dans une abbaye ; deux scènes d’amour et de jalousie sauvent la pièce de l’ennui que pourrait amener l’éclaircissement trop longtemps différé. Malgré toutes les intrigues qui s’entre-croisent, tout est lié dans la fiction, tout s’y développe de la manière la plus heureuse, et le dénoûment a quelque chose de solennel par la reconnaissance qui a lieu devant un tribunal auquel préside le prince.

Shakspeare a eu l’art de motiver son exposition ; dans les Ménechmes de Plaute, elle est faite au moyen d’un prologue ; ma