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ACTE CINQUIÈME


Scène I

Le théâtre représente le camp de César.
CÉSAR, AGRIPPA, DOLABELLA, MÉCÈNE, GALLUS, suite.
César.

Va le trouver, Dolabella ; dis-lui de se rendre, dis-lui que, dépouillé de tout comme il l’est, c’est se jouer de nous que de tant différer.

Dolabella.

J’y vais, César.

(Il sort.)
(Dercétas entre, tenant l’épée d’Antoine.)
César.

Pourquoi cette épée, et qui es-tu pour oser paraître ainsi devant nous ?

Dercétas.

Je m’appelle Dercétas. Je servais Marc Antoine, le meilleur des maîtres, et qui méritait les meilleurs serviteurs. Je ne l’ai point quitté, tant qu’il a été debout et qu’il a parlé, et je ne supportais la vie que pour la dépenser contre ses ennemis. S’il te plaît de me prendre à ton service ; ce que je fus pour Antoine, je le serai pour César. Si tu ne le veux pas, je t’abandonne ma vie.

César.

Qu’est-ce que tu dis ?

Dercétas.

Je dis à César qu’Antoine est mort.

César.

La chute d’un si grand homme aurait dû faire plus de bruit. La terre aurait dû lancer les lions dans les rues des cités, et les habitants des cités dans les antres des lions. — La mort d’Antoine n’est pas le trépas d’un seul. Il y avait dans son nom la moitié de l’univers.

Dercétas.

Il est mort, César, non par la main d’un ministre public de la justice, non par un fer emprunté.