Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 2.djvu/160

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
158
ANTOINE ET CLÉOPÂTRE.

Mécène.

Il faut que Rome soit instruite de toutes ces choses.

Agrippa.

Rome, déjà lassée de son insolence, lui retirera sa bonne opinion.

César.

Le peuple en est instruit, et cependant il vient de recevoir les accusations d’Antoine !

Agrippa.

Qui donc accuse-t-il !

César.

César. Il se plaint de ce qu’ayant dépouillé Sextus Pompée de la Sicile, je l’ai frustré de sa part de cette île ; et il dit ensuite m’avoir prêté quelques vaisseaux qui ne lui ont pas été rendus. Enfin, il se montre indigné de ce que Lépide a été déposé du triumvirat, et de ce qu’une fois déposé j’ai retenu tous ses revenus.

Agrippa.

Seigneur, il faut lui répondre.

César.

C’est déjà fait, et le messager est parti. Je lui mande que Lépide était devenu trop cruel, qu’il abusait de son autorité, et qu’il a mérité d’être déposé. Quant à mes conquêtes, je lui en accorde une portion ; mais, en retour, je lui demande ma part de l’Arménie et des autres royaumes qu’il a conquis.

Mécène.

Jamais il ne vous la cédera.

César.

Alors, je ne dois pas lui céder, moi, ce qu’il demande.

(Entre Octavie.)
Octavie.

Salut, César, monseigneur, salut, mon cher César.

César.

Que je sois obligé de t’appeler une femme répudiée !

Octavie.

Vous ne m’avez pas appelée ainsi, et vous n’en avez pas sujet.

César.

Pourquoi donc venez-vous me surprendre ainsi ? Vous ne revenez point comme la sœur de César : l’épouse d’Antoine devrait être précédée d’une armée, son approche devait être annoncée par les hennissements des chevaux, longtemps avant qu’elle parût ; les arbres de la route auraient dû être chargés de peuple, impatient et fatigué d’attendre votre passage désiré ; il fallait que la poussière élevée sous les pas de votre nombreux cortège montât jusqu’à la voûte des cieux. Mais vous êtes venue