Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 2.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
150
ANTOINE ET CLÉOPÂTRE.

et l’ambition, vertu des guerriers, fait préférer une défaite à une victoire qui ternit la renommée du chef. Je pourrais faire davantage pour Antoine, mais je l’offenserais ; et son ressentiment détruirait tout le mérite de mes services.

Silius.

Ventidius, tu possèdes ces qualités sans lesquelles il n’y a presque point de différence entre un guerrier et son épée. Tu écriras à Antoine ?

Ventidius.

Je vais lui mander humblement tout ce que nous avons exécuté en son nom, mot magique dans la guerre. Je lui dirai comment, avec ses étendards et ses troupes bien payées, nous avons chassé du champ de bataille et lassé la cavalerie parthe, jusqu’alors invaincue.

Silius.

Où est-il maintenant ?

Ventidius.

Il doit se rendre à Athènes. C’est là que nous allons nous hâter de le rejoindre, autant que le permettra le poids de tout ce que nous traînons après nous. Allons, en marche… Que l’armée défile.

(Ils sortent.)



Scène II

Rome. — Antichambre de la maison de César.
Entrent AGRIPPA et ÉNOBARBUS qui se rencontrent.
Agrippa.

Quoi ! nos frères se sont-ils déjà séparés ?

Énobarbus.

Ils ont terminé avec Pompée, qui vient de partir ; et actuellement ils sont tous les trois à sceller le traité. Octavie pleure de quitter Rome. César est triste et Lépide, depuis le festin de Pompée, à ce que dit Ménas, est attaqué de la maladie verte[1].

Agrippa.

C’est un noble Romain que Lépide !

Énobarbus.

Un excellent homme. Oh ! comme il aime César !

Agrippa.

Oui, et avec quelle tendresse il adore Antoine !

  1. Chlorose, pâles couleurs.