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ACTE II, SCÈNE VI.

Antoine.

Les lits d’Orient sont bien doux ! et je vous dois des remerciements, car c’est vous qui m’avez fait revenir ici plus tôt que je ne comptais, et j’y ai beaucoup gagné.

César.

Vous me paraissez changé depuis la dernière fois que je vous ai vu.

Pompée.

Peut-être ; je ne sais pas quelles marques la fortune trace sur mon visage ; mais elle ne pénétrera jamais dans mon sein pour asservir mon cœur.

Lépide.

Je suis bien satisfait de vous voir ici.

Pompée.

Je l’espère, Lépide. — Ainsi, nous voilà d’accord. Je désire que notre traité soit mis par écrit et scellé par nous.

César.

C’est ce qu’il faut faire tout de suite.

Pompée.

Il faut nous fêter mutuellement avant de nous séparer. Tirons au sort à qui commencera.

Antoine.

Moi, Pompée.

Pompée.

Non, Antoine, il faut que le sort en décide. Mais, que vous soyez le premier ou le dernier, votre fameuse cuisine égyptienne aura toujours la supériorité. J’ai ouï dire que Jules César acquit de l’embonpoint dans les banquets de cette contrée.

Antoine.

Vous avez ouï dire bien des choses.

Pompée.

Mon intention est innocente.

Antoine.

Et vos paroles aussi.

Pompée.

Voilà ce que j’ai ouï dire, et aussi qu’Appollodore porta…

Énobarbus.

N’en parlons plus. Le fait est vrai.

Pompée.

Quoi, s’il vous plaît ?

Énobarbus.

Une certaine reine à César dans un matelas.

Pompée.

Je te reconnais à présent. Comment te portes-tu, guerrier ?

Énobarbus.

Fort bien ; et il y a apparence que je continuerai, car j’aperçois à l’horizon quatre festins.

Pompée.

Donne-moi une poignée de main : je ne t’ai jamais haï ; je t’ai vu combattre, et tu m’as rendu jaloux de ta valeur.

Énobarbus.

Moi, seigneur, je ne vous ai jamais beau-