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ACTE III, SCÈNE II.

« Car tu sais, bien-aimé Damon, que ce royaume démantelé appartenant à Jupiter lui-même, et maintenant règne en ces lieux un vrai… un vrai… un vrai paon. »

horatio. — Vous auriez pu mettre la rime [1].

hamlet. — Oh ! mon cher Horatio ! à présent je tiendrais mille livres sterling sur la parole du fantôme. As-tu remarqué ?

horatio. — Très-bien, mon seigneur.

hamlet. — Quand il a été question de l’empoisonnement…

horatio. — Je l’ai très-bien remarqué !

hamlet. — Ah ! ah ! — Allons, un peu de musique ! les flageolets !

« Car si le roi n’aime pas la comédie, eh bien ! alors probablement… c’est qu’il ne l’aime pas, pardieu ! »
(Rosencrantz et Guildenstern entrent.)

Allons ! un peu de musique.

guildenstern. — Non bon seigneur, accordez-moi la grâce de vous dire un mot.

hamlet. — Toute une histoire, monsieur.

guildenstern. — Le roi, monsieur…

hamlet. — Ah ! oui, monsieur. Quelles nouvelles de lui ?

guildenstern. — Il est dans son appartement, singulièrement indisposé.

hamlet. — Par la boisson, monsieur ?

guildenstern. — Non, mon seigneur, par la colère.

hamlet. — Votre sagesse se serait montrée mieux en fonds, en instruisant de ceci le médecin ; car, quant à moi, me charger de lui porter des purgatifs, ce serait peut-être le plonger encore plus avant dans le cholérique.

guildenstern. — Mon bon seigneur, mettez quelque règle à vos discours, et ne faites pas ces bonds sauvages hors de mon sujet.

  1. Hamlet dit : A very peacock ; la rime voulait A very ass ; et Horatio dit à Hamlet que l’indigne roi de Danemark mérite aussi bien le titre d’âne que celui de paon.