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Clarence. ― Que tes réponses sont obscures, mais qu’elles sont sinistres ! vos yeux me menacent : pourquoi êtes-vous si pâles ? Qui vous a envoyés ici ? Pourquoi venez-vous ?

LES DEUX ASSASSINS.― Pour… pour… pour…

Clarence. ― Pour m’assassiner ?

LES DEUX ASSASSINS.― Oui. Oui.

Clarence. ― À peine avez-vous le cœur de me le dire ; vous n’aurez donc pas le cœur de le faire. En quoi, mes amis, vous ai-je offensés ?

premier assassin. ― Nous ? vous ne nous avez pas offensés : mais c’est le roi.

Clarence. ― Je suis sûr d’être bientôt réconcilié avec lui.

premier assassin. ― Jamais, milord. Ainsi, préparez-vous à mourir.

Clarence. ― Êtes-vous donc choisis entre tous les hommes pour égorger l’innocent ? Quel est mon crime ? où sont les preuves qui m’accusent ? quel jury légal a donné son verdict à mon juge ? qui a prononcé l’amère sentence de mort du pauvre Clarence ? Avant que je sois convaincu d’un crime par la loi, me menacer de la mort est un acte illégal. Je vous enjoins, sur vos espérances de rédemption, et par le précieux sang du Christ versé pour nos graves péchés, de sortir d’ici, et de ne me pas toucher. L’action que vous voulez faire est une action damnable.

premier assassin. ― Ce que nous voulons faire, nous le faisons par ordre.

Second assassin. ― Et celui qui l’a donné est notre roi.

Clarence. ― Sujet insensé ! Le grand Roi des rois a dit dans les tables de sa loi : « Tu ne commettras pas de meurtre. »― Veux-tu donc mépriser son ordre pour obéir à celui d’un homme ? Prends garde ; il tient dans sa main la vengeance, pour la précipiter sur la tête de ceux qui violent sa loi.

Second assassin. ― Et c’est cette vengeance qu’il précipite sur toi, comme sur un traître parjure et sur un meurtrier : tu avais fait le serment sacré de combattre pour la cause de la maison de Lancastre.

premier assassin. ― Et, traître au nom de Dieu, tu as