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grandeur pleine d’inquiétudes, je jure que jamais je n’ai aigri Sa Majesté contre le duc de Clarence, et qu’au contraire j’ai plaidé sa cause avec chaleur. Milord, vous me faites une honteuse injure de jeter sur moi, contre toute vérité, ces soupçons déshonorants.

Glocester. ― Vous êtes capable de nier que vous avez été la cause de l’emprisonnement de milord Hastings ?

Rivers. ― Elle le peut, milord ; car…

Glocester. ― Elle le peut, lord Rivers ? et qui ne le sait pas qu’elle le peut ? Elle peut vraiment faire bien plus que le nier : elle peut encore vous faire obtenir nombre d’importantes faveurs et nier après que sa main vous ait secondé, et faire honneur de toutes ces dignités à votre rare mérite. Que ne peut-elle pas ? Elle peut !… oui, par la messe, elle peut…

Rivers. ― Eh bien ! par la messe, que peut-elle ?…

Glocester. ― Ce qu’elle peut, par la messe ! épouser un roi, un beau jeune adolescent. Nous savons que votre grand’mère n’a pas trouvé un si bon parti.

Élisabeth. ― Milord de Glocester, j’ai trop longtemps enduré vos insultes grossières, et vos brocards amers. Par le ciel ! j’informerai Sa Majesté de ces odieux outrages que j’ai tant de fois soufferts avec patience. J’aimerais mieux être servante de ferme que d’être une grande reine à cette condition d’être ainsi tourmentée, insultée, et en butte à vos emportements. Je trouve bien peu de joie à être reine d’Angleterre !

(Entre la reine Marguerite, qui demeure en arrière).

Marguerite. ― Et ce peu, puisse-t-il être encore diminué ! Mon Dieu, je te le demande ! Tes honneurs, ta grandeur, et le trône où tu t’assieds, sont à moi.