Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1863, tome 8.djvu/176

Cette page n’a pas encore été corrigée
174
HENRI VIII.

LA VIEILLE DAME. — En vérité, seulement pour la petite île d’Angleterre, vous devriez risquer le paquet ; moi je le ferais pour le comté de Carnarvon ; oui, quand ce serait la seule dépendance de la couronne. Tenez ! qui vient à nous ?

(Entre le lord chambellan.)

LE CHAMBELLAN. — Bonjour, mesdames : qu’est-ce qu’il en coûterait pour savoir le secret de votre entretien ? ANNE. — Pas même la peine de le demander, mon bon lord ; cela ne vaut pas la question. Nous nous affligions des chagrins de notre maîtresse. LE CHAMBELLAN. — C’était une généreuse occupation, et bien digne de femmes qui ont un bon cœur. Il faut espérer que tout ira bien. ANNE. — Amen, s’il plaît à Dieu. LE CHAMBELLAN. — Vous avez une belle âme, et les bénédictions du Ciel suivent les personnes comme vous ; et pour vous faire connaître, belle dame, que je dis la vérité, et qu’on fait un grand cas de vos nombreuses vertus, Sa Majesté vous témoigne par moi toute son estime, et ne se propose pas moins que de vous décorer du titre de marquise de Pembroke, et à ce titre il ajoute de sa grâce mille livres de revenu annuel. ANNE. — Je ne sais pas quel genre de dévouement je pourrais offrir. Tout ce que je suis, et beaucoup plus encore, n’est rien. Mes prières ne sont pas d’une vertu assez sainte, et mes vœux ne sont guère que de vaines paroles, et cependant mes prières et mes vœux sont tout ce que je peux offrir en retour. Je supplie Votre Seigneurie de vouloir bien être l’interprète de ma reconnaissance et de mes soumissions, et de tous les sentiments que peut exprimer à Sa Majesté une fille timide qui prie le Ciel pour ses jours et sa couronne. LE CHAMBELLAN. — Madame, je ne manquerai pas de confirmer l’opinion avantageuse que le roi a conçue de vous. (À part.) — Je l’ai bien considérée : l’honneur et la beauté sont si heureusement assorties en elle qu’elles ont pris le cœur du roi. Et qui sait encore s’il ne pourra pas sortir de cette lady un brillant qui éclaire toute cette