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PROLOGUE.

veulent être tranquilles et bien intentionnés, je ferai en sorte que, dans l’espace de deux courtes heures, ils en aient abondamment pour leur schelling. Ceux-là seulement qui viennent pour entendre une pièce gaie et licencieuse, et un bruit de boucliers, ou pour voir un bouffon en robe bigarrée, bordée de jaune, seront trompés dans leur attente ; car sachez, indulgents auditeurs, qu’associer ainsi, aux vérités choisies que nous allons vous offrir, le spectacle d’un fou, ou d’un combat, outre que ce serait sacrifier notre propre jugement, et l’intention où nous sommes de ne rien représenter ici que ce que nous jugeons véritable, nous risquerions de ne pas avoir pour nous un seul homme de sens : ainsi, au nom de la bonté de votre âme, et puisque vous êtes connus pour former le premier auditoire de la ville, et le plus heureusement composé, soyez aussi sérieux que nous le désirons ; imaginez que vous avez sous vos yeux les personnages mêmes de notre noble histoire, comme s’ils étaient en vie ; imaginez que vous les voyez grands et suivis de la foule des peuples et des empressements de mille courtisans ; et voyez ensuite comme en un instant cette puissance se trouve atteinte par le malheur et si alors vous avez le courage de rire encore, je dirai qu’un homme peut pleurer le jour de ses noces.