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QUINCE. — Allons, nous ferons ce prologue ; et il sera écrit en vers de huit et de six[1].

BOTTOM. — Non, ajoutez-en encore deux : qu’on le fasse en vers de huit.

SNOUT. — Et les dames ne seront-elles point effrayées du lion ?

STARVELING. — Je le crains bien, je vous assure.

BOTTOM. — Camarades, vous devriez y bien réfléchir. Amener sur la scène, Dieu nous protége ! un lion parmi des dames, c’est une chose bien terrible ; car il n’y a pas de plus redoutable bête sauvage que votre lion, au moins ; nous devons bien faire attention à cela.

SNOUT. — Il faudra donc un autre prologue pour dire que le lion n’est pas un lion.

BOTTOM. — Oh ! il faut que vous nommiez celui qui joue le lion, et que l’on voie la moitié de son visage au travers du cou du lion ; il faut qu’il parle lui-même, et qu’il dise ceci, ou quelque chose d’équivalent : —« Mesdames, ou belles dames, je vous souhaiterais, ou je vous demanderais, ou je vous prierais de ne pas avoir peur, de ne pas trembler ; je réponds de votre vie sur la mienne. Si vous croyiez que je viens ici comme un lion, ce serait exposer ma vie. Non, je ne suis rien de pareil ; je suis un homme tout comme les autres hommes….. » Et alors qu’il dise son nom, et qu’il leur déclare tout net qu’il est Snug le menuisier.

QUINCE. — Allons, cela sera ainsi. Mais il y a encore deux choses bien difficiles : c’est, d’abord, d’introduire le clair de lune dans une chambre ; car vous savez que Pyrame et Thisbé se rencontrent au clair de la lune.

SNUG. — La lune brillera-t-elle le soir que nous jouerons notre pièce ?

BOTTOM. — Un calendrier ! un calendrier ! voyez dans l’almanach, cherchez le clair de lune, cherchez le clair de lune !

QUINCE. — Oui : il y aura de la lune ce soir-là.

BOTTOM. — Alors, vous pouvez laisser

  1. On sait qu’un sonnet ne peut avoir que quatorze vers.>