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quitta pour aller prendre Juliétte, qui dansait avec un autre. Aussitôt qu’elle l’eut senti lui toucher la main, elle lui dit : « Bénie soit votre « venue ! » Et lui, lui serrant la main, répondit : à Quelles bénédicdictions en recevez-vous, madame ? » Et elle reprit en souriant « Ne vous étonnez pas, seigneur, si je bénis votre venue ; M. Mercurio était là depuis longtemps à me glacer, et par votre politesse « vous êtes venu me réchauffer. » (Ce jeune homme, qui s’appelait Mercurio, dit le louche, et que l’agrément de son esprit faisait aimer de tout le monde, avait toujours eu les mains plus froides que la glace.) À ces mots, Roméo répondit « Je suis grandement heureux a de vous rendre service en quoi que ce soit. » Comme la danse finissait, Juliette ne put dire que ces mots : Hélas ! je suis plus à vous a qu’à moi-même. »

Roméo s’étant rendu plusieurs fois dans une petite rue, sur laquelle donnaient les fenêtres de Juliette, un soir elle le reconnut à « son éternument ou à quelque autre signe, » et elle ouvrit la fenêtre. Ils se saluèrent a très-poliment (cortesisnimamente), » et, après s’être longtemps entretenus- de leurs amours, ils convinrent qu’il fallait qu’ils se mariassent, quoi qu’il en pût arriver ; et que cela devait se faite par l’entremise du frère Lonardo, franciscain, « théologien, grand philosophe, distillateur admirable, savant dans l’art de la magie, » et confesseur de presque toute la ville. Roméo l’alla trouver, et le frère, songeant au crédit qu’il acquerrait, non-seqlement auprès du capitaine perpétuel, mais dans toute la ville, s’il parvenait à réconcilier les deux familles, se prêta aux désirs des deux jeunes gens. À l’époque de la Quadngésime, où la confession était d’obligation, Juliette se rendit avec sa mère dans l’église de Saint-François, dans la citiidelle, et étant entrée la première dans le confessionnal, de l’autre côté duquel se trouvait Roméo, également venu à l’église avec son père, ils reçurent la bénédiction nuptiale par la fenêtre du confessionnal, que le frère avait eu soin d’ouvrir ; puis, par les soins d’une très adroite vieille de la maison de Juliette, ils passèrent la nuit ensemble dans son jardin.

Cependant, après les fêtes de Pâques, une troupe nombreuse de Capelletti rencontra, à peu de distance des portes de Vérone, quelques Montecchi, et les attaqua, animée par Tébaldo, cousin germain de jupette, qui, voyant que Roméo faisait tous ses efforts pour arrêter le combat, s’attacha à lui, et, le forçant à se défendre, eu reçut un coup d’épée dans la gorge, dont il lomba mort sur-le-champ. Roméo fut banni, et, peu de temps après, Juliette, près de se voir contrainte d’en épouseur un autre, eut recours an frère Louardo, qui lui donme