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coupable dessein de mettre à profit son absence. Vous êtes perdue !

Mme FORD, bas, à Mme Page. Parlez plus haut. (Élevant la voix.) J’espère que cela n’est pas.

Mme PAGE. Priez Dieu que cela ne soit pas, et que vous n’ayez pas un homme ici caché ; mais ce qu’il y a de certain, c’est que votre mari, avec tout Windsor à sa suite, vient chercher ici le galant. Je suis accourue vous le dire ; si vous vous sentez irréprochable, j’en suis charmée ; mais si vous avez ici un ami, pour Dieu, faites-le partir. Ne demeurez pas interdite ; appelez à votre aide toutes vos facultés, défendez votre réputation, ou dites adieu pour jamais à votre bonne renommée.

Mme FORD. Que faire ? J’ai ici un homme, un ami bien cher. Je redoute moins ma propre honte que le danger qu’il peut courir : je voudrais, dût-il m’en coûter mille livres sterling, qu’il fût hors du logis.

Mme PAGE. Quelle honte ! il ne sert de rien de dire : je voudrais, je ne voudrais pas ; votre mari sera ici dans un instant ; il vous faut trouver un moyen de faire évader votre amant ; car il est impossible que vous le cachiez dans la maison. Oh ! combien vous avez trompé mon attente ! Justement, voici un panier ! si le galant est de taille raisonnable, il pourra s’y fourrer ; vous le recouvrirez de linge sale, que vous aurez l’air d’envoyer à la lessive ; et comme c’est la saison du blanchissage, vos deux domestiques pourront le porter à la prairie de Datchet.

Mme FORD. Il est trop gros ; il n’entrera jamais là. Mon Dieu ! quel parti prendre ?

Falstaff sort de derrière la tapisserie.

FALSTAFF. Voyons cela, voyons cela ! Oh ! j’y entrerai, j’y entrerai ; suivez le conseil de votre amie ; j’y entrerai.

Mme PAGE. Eh quoi ! vous ici, sir John Falstaff ? Est-ce là, chevalier, ce que disaient vos lettres ?

FALSTAFF, bas, à Mme PAGE. Je vous aime et n’aime que vous au monde ; aidez à mon évasion ; je vais me fourrer là dedans… jamais je ne pourrai…

Il entre péniblement dans le panier, que les deux femmes recouvrent de linge sale.

Mme PAGE, à Robin. Jeune homme, aidez à couvrir votre maître ; madame Ford, appelez vos gens. — Chevalier trompeur !

Mme FORD. Holà ! Jean ! Robert ! venez. (Robin sort, des Domestiques entrent.) Dépêchez-vous d’emporter ce panier de linge ; où est le bâton à passer dans l’anse ? ne perdez pas de