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LA TRAGÉDIE DE LOCRINE.

SCÈNE XXI.
[Un camp.]
Entrent Guendeline, Thrasimachus, Madan et ses soldats.
guendeline.

— Ô vous, doux zéphirs qui, avec votre modeste souffle, — traversez les profondeurs de la voûte céleste, — percez la nue jusqu’au trône de Jupiter, — et portez mes prières à son oreille qui entend tout. — Car Locrine a délaissé Guendeline — et appris à aimer la concubine du superbe Humber. — Vous, esprits bienheureux qui, au haut de l’empyrée, — jouissez de vos amours dans d’ineffables délices, — versez sur moi ces larmes que vous versiez — alors que pour la première fois vous sollicitiez vos amantes ! — Ces larmes conviennent à ma détresse, — puisque Locrine évite mon visage dédaigné. — Rougissez, cieux ! Rougis, soleil, et cache tes splendides rayons ; — enfouis dans de sombres nuages tes tresses radieuses, — refuse ta vivifiante lumière à ce monde — où la trahison et le mensonge règnent souverainement. — Que dis-je ? la trahison !… Oui, c’est bien ce crime infâme ; — car Locrine a délaissé Guendeline. — Voyez, les cieux pleurent sur Guendeline ; — le brillant soleil rougit pour Guendeline ; — l’air liquide verse des larmes sur Guendeline ; — la terre même gémit pour Guendeline. — Ils sont plus sensibles que le roi de Bretagne, — car lui, il rejette l’infortunée Guendeline.

thrasimachus.

— Sœur, les plaintes sont superflues dans cette cause. — Cet outrage éclatant doit avoir un châtiment éclatant. — Ce châtiment doit être une guerre à outrance. — Cette guerre doit se terminer par la mort de Locrine ; — et sa mort éteindra vite nos griefs.