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SCÈNE XVI.

estrilde.

— Mieux vaut mourir avec un renom de chasteté — que vivre dans la honte et dans une immense infamie. — Que dira de moi le genre humain — si j’oublie mon amour pour m’attacher à toi ?

locrine.

— Les rois n’ont point à craindre les sentences du vulgaire.

estrilde.

— Mais les dames doivent sauvegarder leur honneur.

locrine.

— Y a-t-il donc de la honte à vivre dans les liens du mariage ?

estrilde.

— Non, mais il y en a à être la maîtresse d’un roi.

locrine.

— Si tu veux céder à l’amour brûlant de Locrine, — tu seras la reine de la belle Albanie.

estrilde.

— Mais Guendeline minerait mon pouvoir.

locrine.

— Sur mon honneur, tu n’auras rien à craindre.

estrilde.

— Eh bien, brave Locrine, Estrilde se livre à toi. — Par les dieux que tu invoques, — par l’ombre redoutée de ton père défunt, — par ta main droite, par ton ardent amour, — aie pitié de la pauvre Estrilde, ta misérable captive !

corinéius.

— Locrine a-t-il donc oublié sa Guendeline, — qu’il fait ainsi sa cour à l’amante du Scythe ? — Eh quoi ! les paroles de Brutus sont-elles si tôt oubliées ? — Mes services sont-ils si vite méconnus ? — Ai-je été si dévoué à ton père aujourd’hui mort, — t’ai-je protégé contre le bras d’Humber, — pour que tu t’acquittes envers moi par une telle ingratitude ? — Est-ce là la récompense de mes cruelles bles-