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LA TRAGÉDIE DE LOCRINE.

premier soldat.

— Présomptueux coquin, veux-tu donc m’enlever ma prise ?

deuxième soldat.

— Non ! c’est toi plutôt qui me ravis mon bien.

TROISIÈME SOLDAT, au deuxième.

— Misérable ! fais céder tes titres aux miens, — ou avec mon épée je perce tes lâches entrailles.

deuxième soldat.

— Tout beau, mon bon monsieur ! il ne suffit pas de parler. — Chien qui aboie mord rarement les étrangers.

locrine.

— Irrespectueux manants, vous vous disputez sous nos yeux ! — Geôlier, emmenez-les d’ici au donjon ; — et qu’ils y restent pour y vider leur querelle ! — Mais toi, belle princesse, ne sois nullement effrayée ; — réjouis-toi au contraire de la faveur qu’a pour toi Locrine.

estrilde.

— Quelle faveur peut avoir pour moi celui qui a tué mon époux ?

locrine.

— C’est la fortune de la guerre qui te l’a enlevé, mon amour.

estrilde.

— Mais c’est Locrine qui a causé sa mort.

locrine.

— Il était l’ennemi de l’empire de Locrine, — et il avait tué mon noble frère Albanact.

estrilde.

— Mais il m’était uni par les liens du mariage, — et vous voudriez que j’aimasse son meurtrier !

locrine.

— Mieux vaut vivre que ne plus vivre.