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LES APOCRYPHES.

pisté, réussit enfin par l’abstention de l’imprévu ; Arden est assassiné. Mais à peine le crime a-t-il été commis, à peine Arden a-t-il expié sa faute par sa mort, que la puissance invisible, qui un moment l’a abandonné, reprend son initiative et se hâte de le venger. Tandis que les meurtriers emportent le cadavre vers le champ fatidique, la neige tombe, et cette neige, en gardant la trace de leurs pas, va les dénoncer à la justice. Ainsi s’impose avec une inéluctable équité la volonté d’en haut. Depuis l’exposition jusqu’à la conclusion, l’action de ce sombre drame est gouvernée par un Ariel muet et invisible qui plane sur la scène, réglant les choses, suscitant les incidents, disposant les hasards, remuant les consciences, soufflant les remords, évoquant les brumes, versant les neiges, improvisant les ténèbres, faisant le jour comme la nuit, jouant avec le ciel et lutinant avec les éléments !

Ce sylphe tutélaire, dont les ailes ont l’envergure de l’infini, c’est la Providence.


Bruxelles, 21 mai 1866.