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EXTRAIT DE LA CHRONIQUE D’HOLINSHED.

à Flessingue, en Zélande. Adam Fowle, qui demeurait à la Fleur de Lys, fut inquiété à propos de cette affaire, transféré à Londres, les jambes liées sous le ventre d’un cheval, et mis en prison à la Maréchaussée. La cause de cette arrestation était une parole qu’on avait ouï dire à Mosby : « Sans Adam Fowle, avait dit celui-ci, ce malheur ne me serait pas arrivé. » Mosby faisait par la allusion au cadeau des dés d’argent qu’Adam lui avait apportés de la part de mistress Arden, — cadeau qui avait été cause de la réconciliation entre les deux amants. L’affaire ayant été examinée à fond, et Mosby ayant justifié l’accusé en affirmant qu’Adam Fowle n’avait jamais eu connaissance du meurtre projeté, l’innocence de l’homme le préserva.

Cette chose sembla très-étrange et très-notable qu’à l’endroit où avait été déposé le cadavre de maître Arden, la forme du corps demeura très-nettement visible, pendant plus de deux ans, l’herbe ayant cessé de croître là où il avait touché, et ayant continué de pousser à la place restée libre entre les jambes, entre les bras et autour de la nuque. Un grand nombre d’étrangers, outre les habitants de la ville, vinrent, durant ce temps, pour voir l’empreinte du corps marquée sur le gazon de ce champ. Lequel champ, à ce qu’on rapporte, avait été très-cruellement enlevé par maître Arden à une femme qui avait été veuve d’un certain Cook et avait épousé en secondes noces un marinier appelé Richard Read. Cet acte de violence avait porté un grave préjudice à cette femme et audit Read son mari. Car depuis longues années, ils avaient exploité ce terrain en vertu d’un bail qui n’était pas encore expiré ; et néanmoins maître Arden le leur avait extorqué ; la femme dudit Read, les larmes aux yeux, avait vivement reproché son iniquité à maître Arden, et lui avait même jeté à la face la plus amère malédiction, appelant sur lui une vengeance qui fît l’étonnement du monde. Ce souhait sinistre sembla réalisé, alors que