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EXTRAIT DE LA CHRONIQUE D’HOLINSHED.

Alors on fit venir la sœur de Mosby qui prit place à table, et tous se réjouirent.

Après souper, mistress Arden dit à sa fille de jouer du virginal ; on dansa, et elle prit part à la danse, soi-disant pour passer le temps jusqu’à l’arrivée de maître Arden. Alors elle dit :

— Je m’étonne qu’il tarde tant. Bah ! il arrivera tout à l’heure, j’en suis sûre. En attendant, jouons, je vous prie, une partie de trictrac.

Mais les bourgeois de Londres répondirent qu’ils devaient s’en retourner à leur auberge, sans quoi ils trouveraient porte close ; et sur ce, prenant congé de mistress Arden, ils s’en allèrent. Quand ils furent partis, les domestiques qui n’étaient pas dans le secret du meurtre furent envoyés par la ville, ceux-ci pour chercher leur maître, ceux-la sous divers prétextes. Michel, une femme de chambre, sœur de Mosby, et une des filles de mistress Arden restèrent. Alors ils enlevèrent le cadavre, et le portèrent au dehors près du cimetière, dans un champ contigu à la muraille du jardin, que traversait maître Arden pour aller à l’église.

Sur ces entrefaites ; il se mit à neiger ; et, quand ils arrivèrent la porte du jardin, ils reconnurent qu’ils avaient oublié la clef ; quelqu’un rentra pour aller la chercher et la rapporta. Ils ouvrirent la porte, portèrent le corps dans le champ, à environ dix pas de la grille du jardin, et le déposèrent tout de son long sur le dos, couvert de sa robe de chambre, avec des pantoufles aux pieds. Et, entre l’un des pieds et une pantoufle, un ou deux brins de jonc étaient restés. Quand ils eurent ainsi placé le cadavre, ils s’en revinrent la maison par le même chemin, à travers le jardin.

Dès qu’ils rentrèrent, ils rouvrirent les portes, et les domestiques qui avaient été envoyés au dehors revinrent. Comme il était alors fort tard, mistress Arden renvoya ses