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ARDEN DE FEVERSHAM.

Mosby, ou je vais me tuer. — Rien ne me dérobera à ton regard foudroyant. — Si tu proclames la guerre, il n’y aura pas de paix pour moi. — Je ferai pénitence pour t’avoir offensé, — et je brûlerai ce livre de prières où j’ai trouvé — la sainte parole qui m’avait convertie. — Vois, Mosby, je vais en arracher les feuilles, — toutes les feuilles, et sous cette couverture dorée, — je réunirai tes douces phrases et tes lettres ; — et je les méditerai constamment, — et je n’aurai plus d’autre religion que ma dévotion pour toi ! — Tu ne veux pas me regarder ? C’en est donc fait de tout ton amour ! — Tu ne veux pas m’entendre ? Quel maléfice bouche donc tes oreilles ? — Pourquoi ne parles-tu pas ? Quel silence enchaîne donc ta langue ? — Je t’ai regardé, moi, comme on regarde l’aigle, — je t’ai écoute avec l’oreille attentive d’un lièvre inquiet, — je t’ai parlé avec les tempéraments du plus doux orateur ; — et, quand à mon tour je te demande de m’écouter, de me regarder, de me parler, — tu es insensible à toutes mes prières ! — Mets tous mes bons procédés en balance avec cette petite faute, — tu verras que je ne mérite pas les airs moroses de Mosby. — Le ressentiment d’une peine ne doit pas être de l’endurcissement. Reprends — ta sérénité, et je ne te ferai plus de peine.

mosby.

— Oh ! non ! je suis un vil artisan ; — mes ailes ne sont faites que pour une humble volée. — Fi ! Mosby !… Non, pas pour mille livres ! — Lui, vous faire l’amour, ce serait impardonnable ! — Nous autres mendiants, nous ne devons pas respirer le même air que les gens bien nés.

alice.

— Le doux Mosby est aussi bien né qu’un roi, — et je suis trop aveuglée pour le juger autrement. — Les fleurs poussent parfois dans les terres en friche, — et les mauvaises herbes dans les jardins. Les roses croissent sur les ronces.