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ARDEN DE FEVERSHAM.

greene.

— Et puis, Michel, vous n’annoncerez pas cette marée-ci à votre maître, — pour qu’eux deux puissent se rendre avant lui sur la dune de Raynham.

michel.

— Soit ! Je consens à tout ce que vous voudrez de moi, — pourvu que vous acceptiez ma compagnie.

Ils sortent.

SCÈNE VIII.
[Feversham. La maison d’Arden.]
Entre Mosby.
mosby.

— Mes pensées en désordre me font fuir la société — et dessèchent à force d’anxiété la moelle de mes os. — Le trouble continuel de mon cerveau sombre — m’affaiblit comme par un excès d’ivresse, — et me flétrit, ainsi que l’aigre vent du nord — étiole les tendres bourgeons du printemps. — Heureux l’homme, si maigre que soit son repas, — qui ne s’attable pas avec la noire inquiétude ! — Celui-là ne fait que languir au milieu des mets les plus délicats — dont l’âme troublée est bourrelée de remords. — La vie pour moi était d’or quand je n’avais pas d’or. — Alors, malgré mes besoins, je dormais tranquille. — La fatigue de ma journée me faisait une nuit de repos, — et le repos de ma nuit me rendait douce la lumière du jour ; — Mais, depuis que j’ai monté au sommet de l’arbre — et que j’ai cherché à bâtir mon nid dans les nues, — la plus légère brise du ciel agite ma couche — et me fait craindre de tomber à terre. — Mais ou m’entraîne la réflexion ? — Le chemin que je recherche, celui du bonheur, — est si bien fermé derrière moi, que je ne puis reculer. — Il faut que