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LES APOCRYPHES.

faire hommage au roi Philippe de Valois pour le duché de Guyenne. À cette insolente sommation, Édouard répond, comme son arrière-petit-fils, par une déclaration de guerre. Mais, avant d’envahir la France, il doit sauver l’Angleterre de l’invasion qui la menace au Nord. « Voulez-vous vaincre le Français, est-il dit dans Henry V, commencez par l’Écossais. » Fidèle à ce mot d’ordre, Édouard marche contre David Bruce, qui a conclu une alliance avec Philippe de Valois et qui, après avoir pris Berwick et pillé Newcastle, assiége dans le château de Roxburgh la comtesse de Salisbury. — À l’approche de l’armée anglaise, David terrifié lève le siége et se sauve en toute hâte. — La comtesse rend grâces à son libérateur et l’invite à honorer de sa présence le manoir délivré. Coup de théâtre. À première vue, Édouard III s’éprend éperdument de la belle châtelaine : pour lui faire sa cour, il renonce à poursuivre l’ennemi et à achever sa victoire. Il éconduit les messagers de l’empereur d’Allemagne. Il enjoint au prince de Galles, qui vient prendre ses ordres, d’aller « s’amuser avec ses amis. » Le son du tambour, qui tout à l’heure l’enchantait, l’agace et l’irrite : « Ah ! s’écrie-t-il, qui donc entonne cette marche guerrière, comme pour alarmer dans mon sein le tendre Cupidon ? Pauvre peau de mouton, comme celui qui la bat la fait hurler !… Va, crève ce parchemin tonnant, et je le dresserai à murmurer les vers les plus doux au cœur d’une nymphe céleste. Car je l’emploierai comme papier à écrire, et, de tambour criard qu’il était, je le réduirai à être un héraut discret entre une déesse et un roi. Qu’on aille dire à ce soldat d’apprendre à toucher du luth ou de se pendre aux bretelles de son tambour. »

Ce guerrier qui naguère rêvait la conquête de la France et de l’Écosse, il n’a plus qu’une pensée, conquérir une femme. Qu’importe que cette femme résiste ! Qu’importe qu’elle ait pour époux ce Salisbury qui, en ce moment-