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SCÈNE VI.

dans vos rues, — et, déchaînés, saccagent tout sur leur passage. — Moi-même, j’ai vu leur spectre tout à l’heure — du haut de cette belle colline d’où j’arrive. — Car, aussi loin que je pouvais diriger mon regard, — j’ai pu apercevoir cinq villes tout en feu, — des champs de blé, des vignobles flamboyants comme un four ; — et, dès que la fumée exhalée dans le vent — s’écartait, j’ai pu voir également — les pauvres habitants, échappés à l’incendie, — tomber innombrables sur les piques des soldats. — Par trois routes ces terribles ministres de la fureur — poursuivent leur marche tragique ; — à droite s’avance le roi vainqueur ; — à gauche, son fils bouillant et effréné, — et au centre, la splendide armée de notre nation ; — toutes ces masses, quoique distantes, sont liguées ensemble — pour laisser la désolation derrière elles. — Fuyez donc, citoyens, si vous êtes sages ; — cherchez plus loin quelque habitation. — Si vous restez ici, vos femmes vont être outragées, — vos trésors partagés sous vos yeux en larmes. — Abritez-vous, car voici la tempête qui s’élève. — Sauvez-vous ! sauvez-vous ! il me semble que j’entends leurs tambours ! — Ah ! misérable France, j’ai grand’peur que tu ne succombes. — Ta gloire tremble comme une muraille chancelante.

Ils sortent.
Tambour. Entre le roi Édouard, à la tête de son armée ; puis Derby et Gobin de Grey.
édouard.

— Où est ce Français, ce guide habile, — qui nous a fait trouver le gué de la Somme — et qui a si bien dirigé notre traversée ?

gobin.

— Me voici, mon bon seigneur.

édouard.

Comment t’appelles-tu ? ton nom ?