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LES DEUX NOBLES PARENTS.

arcite.

Eh bien, advienne que pourra ! — Tu sauras, Palémon, que j’ose aussi bien — mourir que parler ou dormir. Je ne crains qu’une chose, — c’est que la loi nous enlève l’honneur de notre fin. — Défends ta vie.

palémon.

Veille bien sur la tienne, Arcite.

Ils recommencent le combat. Fanfare.
Entrent. Thésée, Hippolyte, Émilie, Pirithoüs, et leur suite.
thésée.

— Quels traîtres ignorants et follement pervers — êtes-vous donc, vous qui, contre la teneur de mes lois, — combattez ainsi, armés en chevaliers, — sans mon congé, et sans hérauts d’armes ? — Par Castor, tous deux mourront !

palémon.

Tiens ta parole, Thésée ! — Traîtres, nous le sommes certainement tous les deux ; tous deux nous avons insulté — à toi et à tes lois. Je suis Palémon, — un homme qui ne peut t’aimer, s’étant échappé de tes prisons : — songe bien à ce que tout cela mérite !… Et celui-ci est Arcite ; — jamais traître plus hardi ne foula ta terre ; — jamais plus fourbe n’eut l’air d’un ami. Voici l’homme — qui fut banni par grâce ; il te brave, toi — et tout ce que tu oserais faire ; sous ce déguisement, — au mépris de l’édit public, il suit ta sœur, — la belle Émilie, cette heureuse et brillante étoile, — dont je suis, moi, (si c’est un titre que de l’avoir vue le premier, — que de lui avoir le premier légué mon âme), — le légitime serviteur ; et, qui pis est, il ose prétendre qu’elle lui appartient ! — C’est de cette trahison que, comme l’amant le plus loyal, — je lui demandais compte en ce moment. Si, — comme on le dit, tu es grand et vertueux, — si tu es le véritable redresseur de toutes les injures, — dis-nous de recommencer la lutte, et tu me