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de l’intérêt de la Créature de conserver sa vie, dans quelque conjoncture & à quelque prix que ce puisse être, on pourrait encore nier qu’il fût de son bonheur d’avoir cette passion dans un degré violent. L’excès est capable de l’écarter de son but, & de la rendre inefficace : cela n’a presque pas besoin de preuve. Car quoi de plus commun que d’être conduit par la frayeur dans le péril que l’on fuyait ? que peut faire pour sa défense & pour son salut, celui qui a perdu la tête ? Or, il est certain que l’excès de la crainte ôte la présence d’esprit. Dans les grandes & périlleuses occasions, c’est le courage, c’est la fermeté qui sauve. Le brave échappe à un danger qu’il voit : mais le lâche sans jugement & sans défense, se hâte vers le précipice que son trouble lui dérobe, & se jette tête baissée dans un malheur qui peut-être ne venoit point à lui.